La notion d’accident du travail recouvre une pluralité de cas qu’il convient de définir. Il est en effet important de bien appréhender cette notion avant de s’intéresser aux démarches à mettre en oeuvre par le salarié et l’employeur ainsi qu’à l’indemnisation à laquelle l’accident du travail ouvre droit.
La notion d’accident du travail
En vertu de l’article L 411-1 du Code de sécurité sociale : « Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ».
Ainsi, pour être en présence d’un accident du travail il faut démontrer 3 éléments :
- l’existence d’une lésion
- l’accident est apparu soudainement à une date précise
- prouver que l’accident a un lien avec le travail
1) l’existence d’une lésion
L’accident doit avoir causé une lésion. Il doit s’agir d’une lésion corporelle (brûlure, coupure, malaise…) ou psychique (choc émotionnel à la suite d’un évènement dans l’entreprise). Cette notion de lésion est appréciée assez largement par la jurisprudence.
Par exemple : est considéré comme une lésion, un choc émotionnel ne laissant pourtant pas de trace extérieure ou encore une tentative de suicide.
En revanche, les dommages portés aux biens ne sont pas considérés comme des lésions corporelles (exemple : bris de lunettes).
2) L’accident doit être apparu soudainement à une date précise
Pour différencier la maladie professionnelle de l’accident du travail, il est exigé que la date de l’accident puisse être clairement déterminée. En effet, contrairement à la maladie professionnelle, dont l’affection peut se réaliser progressivement sans qu’une date de début puisse être forcément déterminée (par exemple : maladies dues à l’amiante), l’accident du travail implique une lésion soudaine qui peut se constater à une date précise.
3) L’accident doit avoir un lien avec le travail
Il est exigé que l’accident soit en lien avec le travail puisque la loi prévoit qu’il doit être survenu « par le fait ou à l’occasion du travail ». Ainsi, n’est pas un accident du travail, l’accident qui intervient pendant la suspension du contrat de travail (grève, mise à pied ou encore congés) car salarié n’est plus sous la subordination juridique de l’employeur.
Accident survenu au temps et lieu de travail
Tout accident survenu au temps et lieu de travail est présumé être un accident professionnel, car le travailleur est alors sous l’autorité et la surveillance de son employeur, même s’il n’existe aucun lien direct entre l’accident et le travail. Ainsi, sera considéré comme accident du travail, l’accident survenu sur le lieu du travail même pendant une période de repos. La victime n’a qu’à établir la réalité de la lésion et sa survenance au temps et lieu de travail pour que son accident soit présumé être un accident du travail.
Accident survenu à l’occasion du travail
Cependant même lorsqu’un accident survient en dehors du lieu de travail il peut être déclaré comme étant un accident professionnel si le salarié est sous la subordination de son employeur. Par conséquent, il importe peu que le salarié ne soit plus sur son lieu de travail pour que l’accident du travail soit retenu, ce qui compte est le fait qu’il se trouve sous l’autorité de son employeur. Ainsi, lorsque le salarié est envoyé en mission par son employeur et qu’il lui arrive un accident, celui-ci pourra être qualifié d’accident du travail.
Il en résulte que les accidents de mission sont présumés être d’origine professionnelle, sauf si la preuve est rapportée que le salarié a interrompu sa mission pour des motifs personnels.
Par exemple : un commercial est envoyé par son employeur pour vendre du matériel a un client, sur la route il s’arrête pour rendre visite à sa mère et a un accident. Cet accident ne pourra être qualifié d’accident du travail puisque le salarié a été victime d’un accident alors qu’il avait interrompu sa mission pour un motif personnel (rendre visite à sa mère).
Accident survenu par le fait du travail
Parfois, la seule circonstance que l’accident soit survenu par le fait du travail suffit à qualifier le caractère professionnel de l’accident. Un accident qui se produit à un moment où le salarié ne se trouve plus sous la subordination juridique de l’employeur constitue un accident du travail dès lors que le salarié établit qu’il est survenu par le fait du travail.
Par exemple : un salarié, qui tente de se suicider à son domicile à cause de son travail, pourra voir qualifier cet accident comme accident du travail.
La procédure de reconnaissance des accidents de travail
Le salarié victime d’un accident du travail doit en informer son employeur, il appartient ensuite à ce dernier d’effectuer les démarches nécessaires pour déclarer l’accident du travail à la Caisse primaire d’assurance maladie. Le salarié doit, quant à lui, se rendre chez son médecin traitant pour que celui-ci constate les lésions résultant de l’accident et délivre un certificat d’arrêt de travail au salarié si besoin.
1) Obligation pour le salarié d’informer son employeur de l’accident dans la journée
En principe, la victime d’un accident du travail est tenu d’informer son employeur de son accident dans la journée où celui-ci s’est produit ou au plus tard dans les 24h. Mais si le salarié déclare tardivement son accident, il ne lui en n’est pas tenu rigueur. En effet, la jurisprudence se montre laxiste quant au respect du délai de prévenance incombant au salarié.
2) Déclaration de l’accident à la CPAM par l’employeur
Une fois informé par son salarié de l’accident, l’employeur a ensuite l’obligation de déclarer l’accident à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) dont il relève dans un délai maximum de 48h à compter de sa connaissance de l’accident. Cette déclaration peut s’effectuer par lettre recommandée avec avis de réception ou en ligne sur le site : www.net-entreprises.fr.
L’employeur ne peut se soustraire à cette obligation, même s’il estime que l’accident de son salarié n’est pas un accident du travail. Lorsque l’employeur n’effectue pas cette démarche dans les 48h, il est passible d’une amende prévue par les contraventions de 4e classe ainsi que du paiement de dommages et intérêts si le salarié le poursuit devant les tribunaux. Dans le cas où l’employeur a fait défaut à son obligation d’envoie de la déclaration d’accident du travail, le salarié pourra suppléé à cette carence en effectuant lui-même cet envoi à la CPAM.
Cependant, si l’employeur ne peut refuser de remplir et d’envoyer la déclaration d’accident du travail à la sécurité sociale, il peut émettre des réserves motivées quant au caractère professionnel de l’accident. Il appartiendra ensuite à la caisse d’assurance maladie de se prononcer sur la caractère professionnel au non de l’accident dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la déclaration.
3) Consultation du médecin et envoie du certificat médical à la CPAM par le salarié
Le salarié victime doit se rendre rapidement chez son médecin traitant pour que celui-ci établisse un certificat médical constatant les lésions provoquées par l’accident du travail et l’état de santé du salarié. Le salarié devra envoyer les volets 1 et 2 de ce certificat à sa CPAM et il devra conserver le volet 3. Ce certificat médical permettra à la CPAM de compléter le dossier de la victime pour juger si l’accident est un accident de travail.
Si un arrêt de travail est nécessaire, le médecin délivrera également au salarié au certificat d’arrêt de travail. Le salarié devra alors envoyer ou remettre ce certificat à son employeur.
4) La décision de la CPAM dans les 30 jours
Dès lors que la CPAM aura reçu le dossier complet de la victime (déclaration d’accident du travail envoyé par l’employeur et certificat médical envoyé par le salarié), elle aura un délai de 30 jours pour se prononcer sur le caractère professionnel ou non de l’accident.
En l’absence de réponse de la CPAM dans ce délai, l’accident est considéré comme un accident du travail.
En cas de refus de la CPAM de reconnaître le caractère professionnel de l’accident, le salarié peut contester cette décision.
L’indemnisation de l’accident de travail
1) Une prise en charge à 100% des frais médicaux
En cas d’accident du travail, les soins médicaux et chirurgicaux sont intégralement remboursés. Le salarié bénéficie d’une prise en charge à 100 % des soins médicaux et chirurgicaux, frais d’analyse ou de pharmacie liés à son accident.
Pour cela, l’employeur doit remettre à son salarié accidenté une feuille d’accident du travail, qui lui garantit sa prise en charge et le dispense de toute avance de frais. Si l’employeur ne le fait pas, le salarié peut directement demander à la CPAM cette feuille. Il devra ensuite présenter cette feuille d’accident du travail aux personnels de santé qu’il consulte afin que chacun y indique les soins reçus. Cette feuille devra être retournée à la CPAM après la fin du traitement du salarié.
2) Un revenu de remplacement versé durant l’arrêt de travail
Des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale
Durant son arrêt de travail, le salarié percevra des indemnités journalières de sécurité sociale qui lui permettra d’avoir un revenu. Si la CPAM a reconnu le caractère professionnel de l’accident, le salarié sera indemnisé au titre d’un accident du travail, sinon il sera indemnisé au titre d’un simple arrêt maladie.
L’employeur devra remplir une attestation de salaire permettant à la Sécurité sociale de calculer les indemnités journalières auxquelles le salarié a droit. Au regard de l’attestation de salaire, le CPAM calculera le salaire journalier de base du salarié (salaire mensuel divisé par 30,42). Selon la durée de l’arrêt de travail pour accident du travail, l’indemnisation ne sera pas la même.
Les indemnités journalières versées seront :
- Durant les 28 premiers jours d’arrêt : 60% du salaire journalier de base
- A partir du 29e jour d’arrêt : 80% du salaire journalier de base
Les indemnités journalières seront calculées dès le premier jour de l’arrêt de travail (pas de délai de carence comme l’arrêt maladie) et seront versées au salarié tous les 14 jours jusqu’à la fin de son arrêt. Cette indemnité est due sans distinction entre jours ouvrables et jours fériés.
Par exemple : un salarié percevait une rémunération mensuel de 1 500 euros brut avant son arrêt de travail. Son salaire journalier de base est de 49,31 euros (1500 / 30,42). Ainsi, le salarié percevra durant les 28 premiers jours de son arrêt, une indemnité égale à 27,61 euros par jour (60% x 49,31) et à partir du 29e jour d’arrêt une indemnité de 39,45 euros par jour (80% x 49,31).
Une indemnité complémentaire versée par l’employeur
L’employeur est tenu de verser une indemnité complémentaire au salarié dès lors que celui-ci a au moins un an d’ancienneté dans l’entreprise et perçoit des indemnités journalières de sécurité sociale. En revanche, il n’est pas tenu de verser cette indemnité pour les salariés temporaires, les salariés saisonniers, les travailleurs à domicile et les intermittents.
La durée de versement de cette indemnité dépend de l’ancienneté du salarié (de 60 jours à 180 jours selon l’ancienneté). L’employeur doit compléter les indemnités journalières de sécurité sociale de manière à garantir à son salarié un revenu de remplacement égal à :
- pendant les 30 premiers jours d’arrêt de travail : 90 % de la rémunération brute mensuelle
- pendant les 30 jours d’arrêt suivants : 66,66 % de cette même rémunération
La convention collective applicable à votre branche d’activité peut prévoir une indemnisation plus importante par l’employeur (maintien intégral de la rémunération), il convient donc de se reporter aux dispositions conventionnelles applicables.
Par exemple : un salarié percevant une rémunération brute mensuelle de 1 500 euros devra recevoir un salaire de 1 350 euros brut par mois durant les 30 premiers jours de son arrêt (1 500 x 90%). Ainsi, dans le cas où le salarié perçoit 650 euros en indemnités journalières versées par la sécurité sociale, l’employeur devra compléter son revenu en versant 700 euros afin d’atteindre les 90% de sa rémunération brute.
Il convient de noter que généralement, l’employeur fait une demande de subrogation à la sécurité sociale. Ainsi, les démarches sont simplifiées, la sécurité sociale verse directement les indemnités journalières à l’employeur et l’employeur établit un bulletin de paie pour le salarié comprenant les indemnités journalières de sécurité sociale et le complément de rémunération. De cette manière, le salarié ne reçoit pas deux versements (l’un de l’employeur et l’un de la sécurité sociale), mais un seul versement de son revenu de remplacement total versé par l’employeur.
3) Une indemnisation complémentaire en cas de faute inexcusable de l’employeur
Tout employeur est garant de la sécurité physique et morale des salariés agissant sous ses ordres. Dans cette logique, une politique de prévention des risques doit être mise en place dans l’entreprise pour éviter la survenance d’accidents.
Ainsi, dès lors qu’un accident survient alors que l’employeur : "avait ou aurait dû conscience du danger auquel était exposé son salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver", il commet une faute inexcusable.
Deux éléments sont pris en compte pour que la faute inexcusable soit retenue :
- la conscience du danger qu’avait ou aurait dû avoir l’employeur
- l’absence de mesures prises par l’employeur pour prévenir ou protéger son salarié du danger
Par exemple : le non-respect de la réglementation en matière de sécurité : le fait de ne pas obliger ses salariés à porter un casque de sécurité sur des chantiers est une faute inexcusable.
Le salarié ou ses ayants-droits (en cas de décès) devront saisir la CPAM et ensuite le Tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur. Si celle-ci est reconnue, elle ouvrira droit à une majoration des indemnités versées au salarié au frais de l’employeur. Le salarié pourra également réclamer la réparation intégrale de sa perte de gains professionnels.